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le chott rharsa.

et les eaux du golfe de Gabès, que lui amènerait le premier canal, seraient strictement contenues dans les limites prévues.

Cependant, tout en faisant route, il était possible d’observer la dépression sur une vaste étendue. La surface de cette aride cuvette du Rharsa, sous les rayons du soleil, miroitait comme si elle eût été doublée d’une feuille d’argent, de cristal ou de camphre. Les yeux ne pouvaient en soutenir l’éclat et il fallait les préserver au moyen de verres fumés pour éviter les ophtalmies si fréquentes sous l’ardeur de la lumière saharienne. Les officiers et leurs hommes s’en étaient munis à cette intention. Le marchef Nicol avait même fait acquisition de fortes besicles pour son cheval. Mais il ne paraissait pas que cela eût convenu à Va-d’l’avant de porter lunettes. C’était quelque peu ridicule, et Coupe-à-cœur, derrière cet appareil optique, ne reconnaissait plus la figure de son camarade. Aussi Va-d’l’avant ni aucun des chevaux n’étaient-ils pourvus de ces préservatifs, indispensables à leurs maîtres.

Du reste, le chott présentait bien l’aspect de ces lacs salins, qui se dessèchent l’été sous l’action des chaleurs tropicales. Mais une partie de la couche liquide, entraînée sous les sables, rejette les gaz qui la chargent, et le sol se hérisse de boursouflures qui le font ressembler à un champ semé de taupinières ; quand au fond de ce chott, l’ingénieur fit remarquer aux deux officiers qu’il se composait de sable rouge quartzeux mélangé de sulfate et de carbonate de chaux. Cette couche se recouvrait d’efflorescences formées de sulfate de soude et de chlorure de sodium, véritable croûte de sel. D’ailleurs, le terrain pliocène où se rencontrent les chotts et les sebkha fournit par lui-même le gypse et le sel en abondance.

Il est bon de noter qu’à cette époque de l’année le Rharsa ne s’était pas vidé de toutes les eaux que les oueds y amènent l’hiver. En s’éloignant parfois des ghourd, c’est-à-dire des dunes