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L’ARCHIPEL EN FEU.

il se présentait dans de meilleures conditions au regard des observateurs.

Aussi, ce mot : sacolève ! s’échappa-t-il, un instant après, de la bouche du vieux Gozzo.

« Une sacolève ! » s’écrièrent ses compagnons, dont le désappointement se traduisit par une bordée de jurons.

Mais, à ce sujet, il n’y eut aucune discussion, parce qu’il n’y avait pas d’erreur possible. Le navire, qui manœuvrait à l’entrée du golfe de Coron, était bien une sacolève. Après tout, ces gens de Vitylo avaient tort de crier à la malechance. Il n’est pas rare de trouver quelque cargaison précieuse à bord de ces sacolèves.

On appelle ainsi un bâtiment levantin de médiocre tonnage, dont la tonture, c’est-à-dire la courbe du pont, s’accentue légèrement en se relevant vers l’arrière. Il grée sur ses trois mâts à pibles des voiles auriques. Son grand mât, très incliné sur l’avant et placé au centre, porte une voile latine, une fortune, un hunier avec un perroquet volant. Deux focs à l’avant, deux voiles en pointe sur les deux mâts inégaux de l’arrière, complètent sa voilure, qui lui donne un singulier aspect. Les peintures vives de sa coque, l’élancement de son étrave, la variété de sa mâture, la coupe fantaisiste de ses voiles, en font un