Donc, dès le lever du jour, miss Campbell avait pris possession d’une charmante et coquette chambre, installée à l’arrière du yacht. Les deux frères occupaient les couchettes de la « Main-Cabin », au delà du salon, confortablement établie dans la portion la plus large du petit bâtiment. Olivier Sinclair s’arrangeait d’une cabine ménagée au retour du grand escalier qui conduisait au salon. Des deux côtés de la salle à manger, traversée par le pied du grand mât, dame Bess et Partridge disposaient de deux cadres, l’un à droite, l’autre à gauche, sur l’arrière de l’office et de la chambre du capitaine. Plus en avant, c’était la cuisine, où demeurait le maître-coq. Plus en avant encore, le poste de l’équipage, muni de ses branles pour six matelots. Rien ne manquait à ce joli yawl, construit par Ratsey, de Cowes. Avec belle mer et jolie brise, il avait toujours tenu un rang honorable dans les régates du « Royal Thames yacht Club ».
Ce fut une réelle joie pour tous, lorsque la Clorinda, mise en appareillage, son ancre levée, commença à prendre le vent, sous sa grand’voile, son tapecul, sa trinquette, son foc et son flèche. Elle s’inclina gracieusement à la brise, sans que son pont blanc, en sape du Canada, fût mouillé d’un seul embrun des petites lames que fendait une étrave, coupée perpendiculairement à la ligne des eaux.
La distance qui sépare ces deux petites Hébrides, Iona et Staffa, est très courte. Avec un vent portant, vingt à vingt-cinq minutes eussent suffi à la franchir, pour un yacht qui, sans être trop forcé, enlevait facilement ses huit milles à l’heure. Mais, en ce moment, il avait le vent debout, — une légère brise tout au plus ; en outre, la marée descendait, et c’était contre un jusant assez prononcé qu’il lui fallait courir un certain nombre de bords, avant d’arriver à la hauteur de Staffa.
D’ailleurs, peu importait à miss Campbell. La Clorinda partie, c’était le principal. Une heure plus tard, Iona s’effaçait dans les brumes matinales, et, avec elle, l’image détestée de ce trouble-fête, dont Helena voulait oublier jusqu’au nom.
Et elle le dit franchement à ses oncles :
« Est-ce que je n’ai pas raison, papa Sam ?
— Tout à fait raison, ma chère Helena.
— Est-ce que maman Sib ne m’approuve pas ?
— Absolument.
— Allons, ajouta-t-elle en les embrassant, convenons que des oncles qui