Page:Verne - L’École des Robinsons - Le Rayon vert.djvu/227

Cette page a été validée par deux contributeurs.
7
le frère sam et le frère sib

quitte la retraite où elle soupirait en secret, et paraît dans toute sa beauté comme la lune au bord d’un nuage de l’Orient…

— « Et l’éclat de ses charmes l’environne comme des rayons de lumière, frère Sib, et le bruit de ses pas légers plaît à l’oreille comme une musique agréable ! »

Heureusement, les deux frères, s’arrêtant là de leurs citations, retombèrent du ciel un peu nuageux des bardes dans le domaine des réalités.

« À coup sûr, dit l’un, si Helena plaît à notre jeune savant, lui ne peut manquer de plaire…

— Et si, de son côté, frère Sam, elle n’a pas encore accordé toute l’attention qui est due aux grandes qualités, dont il a été si libéralement doué par la nature…

— Frère Sib, c’est uniquement parce que nous ne lui avons pas encore dit qu’il est temps de songer à se marier.

— Mais le jour où nous aurons seulement dirigé sa pensée vers ce but, en admettant qu’elle ait quelque prévention, sinon contre le mari, du moins contre le mariage…

— Elle ne tardera pas à répondre oui, frère Sam…

— Comme cet excellent Bénédict, frère Sib, qui, après avoir longtemps résisté…

— Finit, au dénouement de Beaucoup de bruit pour rien, par épouser Béatrix ! »

Voilà comment ils arrangeaient les choses, les deux oncles de miss Campbell, et le dénouement de cette combinaison leur semblait aussi naturel que celui de la comédie de Shakespeare.

Ils s’étaient levés d’un commun accord. Ils s’observaient avec un fin sourire. Ils se frottaient les mains en mesure. C’était une affaire conclue, ce mariage ! Quelle difficulté aurait pu surgir ? Le jeune homme leur avait fait sa demande. La jeune fille leur ferait sa réponse, dont ils n’avaient même pas à se préoccuper. Toutes les convenances y étaient. Il n’y avait plus qu’à fixer la date.

En vérité, ce serait une belle cérémonie. Elle s’accomplirait à Glasgow. Par exemple, ce ne serait point à la cathédrale de Saint-Mungo, seule église de l’Écosse qui, avec Saint-Magnus des Orcades, ait été respectée à l’époque de la Réforme. Non ! Elle est trop massive, par conséquent trop triste pour un mariage, qui, dans la pensée des frères Melvill, devait être comme un épanouis-