Page:Verne - L’École des Robinsons - Le Rayon vert.djvu/208

Cette page a été validée par deux contributeurs.
196
l’école des robinsons

Pendant cette promenade, on aperçut au loin quelques fauves, mais ils n’osèrent pas s’attaquer à la troupe nombreuse et bien armée des matelots du Dream. Toutefois, leur présence n’en était pas moins un fait absolument incompréhensible.

Puis, on revint à bord, non sans que Tartelett eût demandé la permission d’emporter « son crocodile » comme pièce à l’appui, — permission qui lui fut accordée.

Le soir, tout le monde étant réuni dans le carré du Dream, on fêtait par un joyeux repas la fin des épreuves de Godfrey Morgan et ses fiançailles avec Phina Hollaney.

Le lendemain, 20 janvier, le Dream, appareillait sous le commandement du capitaine Turcotte. À huit heures du matin, Godfrey, non sans quelque émotion, voyait à l’horizon de l’Ouest s’effacer, comme une ombre, cette île sur laquelle il venait de faire cinq mois d’une école dont il ne devait jamais oublier les leçons.

La traversée se fit rapidement, par une mer magnifique, avec un vent favorable qui permit d’établir les goélettes du Dream. Ah ! il allait droit à son but, cette fois ! Il ne cherchait plus à tromper personne ! Il ne faisait pas des détours sans nombre, comme au premier voyage ! Il ne reperdait pas pendant la nuit ce qu’il avait gagné pendant le jour !

Aussi, le 23 janvier, à midi, après être entré par la Porte d’or, dans la vaste baie de San Francisco, venait-il tranquillement se ranger au warf de Merchant-Street. Et que vit-on alors ?

On vit sortir du fond de la cale un homme qui, après avoir atteint le Dream à la nage, pendant la nuit de son mouillage à l’île Phina, avait réussi à s’y cacher une seconde fois !

Et quel était cet homme ?

C’était le Chinois Seng-Vou, qui venait de faire le voyage du retour comme il avait fait celui de l’aller !

Seng-Vou s’avança vers William W. Kolderup.

« Que monsieur Kolderup me pardonne, dit-il très poliment. Lorsque j’avais pris passage à bord du Dream, je croyais qu’il allait directement à Shangaï, où je voulais me rapatrier ; mais, du moment qu’il revient à San Francisco, je débarque ! »

Tous, stupéfaits devant cette apparition, ne savaient que répondre à l’intrus qui les regardait en souriant.