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l’école des robinsons

— Non ! dit-il. Rien encore de suspect ! Ce sont nos bêtes qui rentrent sous le bois.

— Chassées, peut-être ! s’écria Tartelett.

— Elles paraissent fort tranquilles, au contraire, répondit Godfrey. Je croirais plutôt qu’elles viennent seulement chercher un abri contre la rosée du matin.

— Ah ! murmura Tartelett d’un ton si piteux que Godfrey eût ri volontiers sans la gravité des circonstances, voilà des choses qui ne nous arriveraient pas à l’hôtel Kolderup, dans Montgomery-Street !

— Le jour ne tardera pas à se lever, dit alors Godfrey. Avant une heure, si les indigènes n’ont pas paru, nous quitterons Will-Tree, et nous irons en reconnaissance dans le nord de l’île. — Vous êtes bien capable de tenir un fusil, Tartelett ?

— Tenir !… oui !…

— Et de tirer dans une direction déterminée ?

— Je ne sais pas !… Je n’ai jamais essayé, et vous pouvez être sûr, Godfrey, que ma balle n’ira pas…

— Qui sait si la détonation seule ne suffira pas à effrayer ces sauvages ! »

Une heure après, il faisait assez jour pour que le regard pût s’étendre au delà du groupe de séquoias.

Godfrey releva alors successivement, mais avec précaution, les auvents des deux fenêtres. À travers celle qui s’ouvrait vers le sud, il ne vit rien que d’ordinaire. Les animaux domestiques erraient paisiblement sous les arbres et ne paraissaient nullement effrayés. Examen fait, Godfrey referma soigneusement cette fenêtre. À travers la baie dirigée vers le nord, la vue pouvait se porter jusqu’au littoral. On apercevait même, à deux milles environ, l’extrémité de Flag-Point ; mais l’embouchure du rio, à l’endroit où les sauvages avaient débarqué la veille, n’était pas visible.

Godfrey regarda d’abord, sans se servir de sa lunette, afin d’observer les environs de Will-Tree de ce côté de l’île Phina.

Tout était parfaitement tranquille.

Godfrey, prenant alors sa lunette, parcourut le périple du littoral jusqu’à la pointe du promontoire de Flag-Point. Peut-être, et comme l’avait dit Tartelett, bien que cela eût été inexplicable, les naturels se seraient-ils rembarqués, après une nuit passée à terre, sans même avoir cherché à reconnaître si l’île était habitée.