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où godfrey voit encore une légère fumée

moment où les extrêmes branches supérieures commencèrent à fléchir sous son poids.

Un large horizon d’eau entourait l’île Phina, qui se déroulait à ses pieds comme une carte en relief.

Ses yeux parcoururent avidement cette portion de mer. Elle était toujours déserte. Il fallait bien en conclure, une fois de plus, que l’île se trouvait hors des routes commerciales du Pacifique.

Godfrey étouffa un gros soupir ; puis, ses regards s’abaissèrent vers cet étroit domaine, sur lequel la destinée le condamnait à vivre, longtemps sans doute, toujours peut-être !

Mais quelle fut sa surprise lorsqu’il revit, dans le nord cette fois, une fumée semblable à celle qu’il avait déjà cru apercevoir dans le sud. Il regarda donc avec la plus extrême attention.

Une vapeur très déliée, d’un bleu plus foncé à sa pointe, montait droit dans l’air calme et pur.

« Non ! je ne me trompe pas ! s’écria Godfrey. Il y a là une fumée, et, par conséquent, un feu qui la produit !… et ce feu ne peut avoir été allumé que par… Par qui ?… »

Godfrey prit alors avec une extrême précision le relèvement de l’endroit en question.

La fumée s’élevait au nord-est de l’île, au milieu des hautes roches qui bordaient le rivage. Il n’y avait pas d’erreur possible. C’était à moins de cinq milles de Will-Tree. En coupant droit sur le nord-est, à travers la prairie, puis, en suivant le littoral, on devait nécessairement arriver aux rochers qu’empanachait cette légère vapeur.

Tout palpitant, Godfrey redescendit l’échafaudage de branches jusqu’à la fourche. Là, il s’arrêta un instant pour arracher un fouillis de mousse et de feuilles ; puis, cela fait, il se glissa par l’orifice, qu’il boucha du mieux qu’il put, et se laissa rapidement couler jusqu’au sol.

Un seul mot jeté à Tartelett pour lui dire de ne point s’inquiéter de son absence, et Godfrey s’élança dans la direction du nord-est, de manière à gagner le littoral.

Ce fut une course de deux heures, d’abord à travers la verdoyante prairie, au milieu de bouquets d’arbres clairsemés ou de longues haies de genêts épineux, ensuite le long de la lisière du littoral. Enfin la dernière chaîne de roches fut atteinte.