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où godfrey voit encore une légère fumée

mises dans le brasier, de manière à s’imprégner d’une chaleur intense. Peut-être Tartelett trouva-t-il qu’il était dommage d’employer un si bon feu « à cuire des pierres », mais comme cela ne gênait en aucune façon la préparation de ses poulets, il ne s’en plaignit pas autrement.

Pendant que les pierres s’échauffaient ainsi, Godfrey choisit un endroit du sol, dont il arracha l’herbe sur l’espace d’un yard carré environ ; puis, ses mains armées de larges coquilles, il enleva la terre jusqu’à une profondeur de dix pouces. Cela fait, il disposa au fond de ce trou un foyer de bois sec qu’il alluma, de manière à communiquer à la terre, tassée au fond du trou, une chaleur assez considérable.

Lorsque tout ce bois eut été consumé, après enlèvement des cendres, les racines de camas, préalablement nettoyées et grattées, furent étendues dans le trou ; une mince couche de gazon les recouvrit, et les pierres brûlantes, placées par-dessus, servirent de base à un nouveau foyer, qui fut allumé à leur surface.

En somme, c’était une sorte de four qui avait été préparé de la sorte, et, après un temps assez court, — une demi-heure au plus, — l’opération dut être considérée comme finie.

En effet, sous la double couche de pierres et de gazon qui fut enlevée, on retrouva les racines de camas modifiées par cette violente torréfaction. En les écrasant, on eût pu obtenir une farine très propre à faire une sorte de pain ; mais, en les laissant à leur état naturel, c’était comme si l’on mangeait des pommes de terre de qualité très nourrissante.

Ce fut ainsi que ces racines furent servies, cette fois, et nous laissons à penser quel déjeuner firent les deux amis avec ces jeunes poulets qu’ils dévorèrent jusqu’aux os, et ces excellents camas qu’ils n’avaient pas besoin de ménager. Le champ n’était pas loin, où ils poussaient en abondance. Il n’y avait qu’à se baisser pour les récolter par centaines.

Ce repas achevé, Godfrey s’occupa de préparer une certaine quantité de cette farine, qui se conserve presque indéfiniment et peut être transformée en pain pour les besoins de chaque jour.

Cette journée se passa dans ces diverses occupations. Le foyer fut toujours alimenté avec le plus grand soin. On le chargea plus particulièrement de combustible pour la nuit, — ce qui n’empêcha pas Tartelett de se relever à plusieurs reprises, afin d’en rapprocher les charbons et de provoquer une combustion plus active. Puis, il venait se recoucher ; mais, comme il rêvait