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V

au large.

Peu à peu, la vie de bord prit son cours normal. À huit heures, on sonnait le thé, puis la cloche appelait les passagers à midi et à sept heures du soir, pour le déjeuner et le dîner.

Thompson, on le voit, avait adopté les habitudes françaises. Sous prétexte que les nombreux repas anglais seraient impossibles pendant les excursions projetées, il les avait préalablement supprimés à bord du Seamew. À aucun il n’avait fait grâce, même pas au « five o’clock » si cher aux estomacs britanniques. Volontiers il vantait l’utilité de cette révolution gastronomique, et prétendait habituer ainsi ses compagnons de route au genre de vie qu’il leur faudrait adopter quand on en serait à parcourir les îles. Précaution vraiment humaine, qui avait le double mérite d’être en même temps économique.

Vie monotone que cette vie de bord, mais non pas ennuyeuse. La mer est toujours là, spectacle éternellement changeant. On croise des navires, des terres se montrent, coupant le géométrique horizon.

À ce dernier point de vue, les hôtes du Seamew étaient, il est vrai, mal partagés. Le premier jour seulement, une brumaille avait indiqué, à l’horizon du Sud, la côte française de Cherbourg. Depuis, aucun point solide ne s’était érigé hors du vaste disque liquide dont le navire formait le centre mouvant.

Les passagers paraissaient s’accommoder de cette existence. En conversations, en promenades, ils se récréaient de leur mieux, ne quittant guère le spardeck, salon et place publique à la fois.

Bien entendu, il ne s’agit ici que des passagers valides, dont