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QUITTES !

long moment, il resta silencieux, sans qu’Alice fît aucun effort pour l’aider à vaincre sa gêne.

« Bonsoir, Alice, dit enfin Jack. Vous m’excuserez de vous importuner à pareille heure. J’ai à vous faire une communication qui ne souffre pas de retard.

Alice persista dans son silence, sans manifester la moindre curiosité.

— Vous avez remarqué que la caravane n’a pas continué sa route aujourd’hui, reprit Jack avec une timidité croissante, et vous vous en êtes sans doute étonnée. Je l’étais également, quand le cheik m’a donné ce soir les raisons de sa conduite.

À ce point, Jack fit une pause, espérant un mot d’encouragement qui ne vint pas.

— Comme vous le savez, poursuivit-il, c’est dans un pur but de lucre que les Maures ont envahi notre camp. Leur objectif est beaucoup moins de nous réduire en esclavage, que de tirer de fortes rançons de ceux qui sont en état d’en verser. Mais ces rançons, il faut encore que l’on puisse se les procurer, et c’est pourquoi le cheik a décidé de rester ici le temps nécessaire pour envoyer jusqu’aux possessions françaises l’un de nous choisi par lui, qui, au nom des autres naufragés et au sien propre, réunirait les sommes exigées et irait les verser à un endroit fixé contre remise des prisonniers.

Jack fit inutilement une nouvelle pause, afin de provoquer une interruption.

— Vous ne me demandez pas, suggéra-t-il, qui de nous le cheik a choisi pour cette mission ?

— J’attends que vous me le disiez, répondit Alice d’une voix calme qui ne rassura pas son beau-frère.

— En effet, dit-il en souriant avec effort.

Toutefois, il considéra que quelques périphrases supplémentaires ne seraient pas superflues.

— Vous devez penser, reprit-il, que l’attention du cheik s’est portée spécialement sur Dolly et sur vous, après ce que lui a dit