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XIII

où l’excursion de l’agence thompson menace de prendre des proportions tout à fait imprévues.

Le long de l’ourlet liquide dont la mer borde le rivage, contournant les dunes les plus hautes, franchissant les autres, Robert Morgand suit d’un pas souple et régulier la route du Sud. Afin de relever leur courage, il a un peu doré pour ses compagnons la situation véritable. Mais, en réalité, il ne s’y trompe pas. C’est un minimum de cent soixante kilomètres qu’il lui faudra égrener, avant d’arriver dans le rayon de l’influence française.

Cent soixante kilomètres, cela représente, à ce train persistant de six kilomètres à l’heure, trois jours de voyage et d’efforts, à raison de dix heures de marche par chaque journée.

Ces dix heures de marche, Robert a résolu qu’il les ferait ce jour même. Parti à trois heures de l’après-midi, il ne s’arrêtera qu’à une heure du matin, pour repartir au lever de l’aube. Ainsi, il gagnera vingt-quatre heures.

Le soleil décline à l’horizon. Il fait grand jour encore, mais une fraîcheur s’élève de la mer et stimule le courage du marcheur, qui, depuis près de cinq heures, suit sa route obstinée. Avant une heure, il fera nuit, et alors la marche sera douce sur ce sable ferme, qui offre au pied un élastique point d’appui.

Autour de Robert, c’est le désert et sa poignante tristesse. Pas un oiseau, pas un être animé dans cette immensité, que son regard, de temps à autre, peut parcourir jusqu’à l’horizon, selon le vallonnement capricieux des dunes. Sur cette étendue morne,