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PREMIER CONTACT.

— Elles ne sauraient excuser un mensonge, répliqua Robert sèchement.

Thompson eut un dédaigneux mouvement d’épaules. Ah bien ! il n’en était pas à un mensonge près, quand il s’agissait de réclame !

— Voyons ! voyons ! cher monsieur, reprit-il d’un ton insinuant, de quoi vous plaignez-vous ? Elle est exacte, après tout, cette mention, j’ose le dire. N’êtes-vous pas Français ? N’êtes-vous pas professeur ? N’avez-vous pas fait vos études à l’Université de France, et n’est-ce pas d’elle que vous tenez vos diplômes ?

Thompson savourait la force de ses déductions. Il s’écoutait, s’appréciait. Il se persuadait lui-même.

Robert n’était pas d’humeur à entreprendre une discussion bien inutile.

— Oui, oui, vous avez raison, se contenta-t-il de répondre ironiquement. Et je sais aussi toutes les langues. C’est entendu.

— Eh bien ? quoi, toutes les langues ? se récria Thompson. Toutes les langues « utiles », entendez-vous bien ? Le mot « utiles » a été oublié, positivement. Voilà une grande affaire, j’ose le dire ! »

Robert désigna du geste Piperboom, assistant de loin à cette scène, en compagnie de Saunders. Cet argument était sans réplique.

Thompson, probablement, ne le jugea pas ainsi, car il se borna à claquer les doigts d’un air détaché. Puis ses lèvres plissées laissèrent échapper un « Pfuut ! » insouciant, et, finalement, pirouettant sur ses talons avec désinvolture, il planta là son interlocuteur.

Robert eût peut-être poussé l’explication plus avant, mais un incident vint changer le cours de ses idées. Un passager sortait à ce moment du couloir des cabines et se dirigeait vers lui.

Blond, de taille élancée, d’une élégance discrète et soignée, ce passager portait en lui un je ne sais quoi de « pas Anglais » auquel Robert ne pouvait se méprendre. Aussi fut-ce avec plaisir,