Page:Verne - L'Agence Thompson and C°, Hetzel, 1907.djvu/405

Cette page a été validée par deux contributeurs.
381
COMME UNE LAMPE QUI S’ÉTEINT.

Quant au capitaine, pendant qu’on l’accablait, il faisait comme toujours son devoir.

À peine au courant de la nouvelle complication, il s’était affalé dans la cale, et, en ce moment, il procédait à un minutieux examen, dont le résultat n’avait rien d’encourageant.

Il eut beau, en effet, l’explorer soigneusement de bout en bout, il ne put trouver de blessures dans la carène. Il n’y avait pas, à proprement parler, de voie d’eau qu’il eût été possible d’aveugler avec plus ou moins de difficulté, ou plutôt il y en avait par centaines. Si en aucun point la mer ne pénétrait en abondance dans l’intérieur du navire, elle y suintait goutte à goutte par mille endroits. Évidemment, sous les chocs répétés des lames, les rivets avaient pris du jeu, les coutures s’étaient entr’ouvertes, et le Seamew mourait tout simplement de vieillesse.

À cela, rien à faire, et le capitaine, écoutant, l’oreille collée au vaigrage, le bruissement de l’eau assassine, ne put que se reconnaître désarmé.

Cependant, il avait son air habituel en remontant sur le spardeck quelques instants plus tard, et c’est d’une voix tranquille qu’il ordonna à l’équipage de se mettre aux pompes.

Après tout, la situation n’était pas désespérée. La terre était prochaine, et l’on avait le droit de compter que les pompes courageusement manœuvrées arriveraient à assécher la cale.

Il fallut renoncer à cet espoir. Des sondages fréquents démontrèrent bientôt que la mer envahissante gagnait, malgré tous les efforts, environ cinq centimètres par heure.

D’autre part, la terre, visible toujours, ne paraissait pas sensiblement plus près. Le soleil se coucha avant que le nuage lointain eût cessé d’être un nuage.

Personne ne dormit cette nuit-là. Fébrilement, on attendait le lever du soleil, qui fort heureusement se lève de bonne heure au mois de juin.

Avant quatre heures, on distingua une terre basse et sablon-