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XIV

le curral das freias.

Le lendemain, les huit hamacs se trouvèrent exactement devant l’Hôtel d’Angleterre. À six heures, la caravane — combien réduite ! — se mit en route dans la fraîcheur délicieuse du matin.

Au pas allègre de ses seize porteurs, escortée de seize autres porteurs de relais, elle s’engagea sur le Chemin Neuf, et, pendant une heure et demie, longea la mer sur cette route bien entretenue. Avant huit heures, on fit une courte halte à Camara de Lobos, puis on attaqua résolument la montagne par un chemin auquel son extrême raideur a valu le nom de « Mata Boes », ou « Tueur de Bœufs ».

Ce sentier où les bœufs succombent, les hommes l’assaillaient et le domptaient. C’était merveille de voir les porteurs de hamac. Deux heures durant, en se relayant de quinze en quinze minutes, ils poursuivirent la dure montée, d’un égal effort, sans une plainte. Vers dix heures seulement, ils soufflèrent. La route, en cet endroit, franchissait un petit torrent alors à sec, et le pavé faisait place à la terre reposante.

Encore une heure de marche, puis, ayant traversé un bois de vieux châtaigniers, un steppe désolé, où quelques sapins subsistent seuls d’une ancienne forêt, et enfin une lande couverte d’odorantes bruyères, les porteurs s’arrêtèrent auprès d’une barrière rustique, au delà de laquelle apparaissaient les murs rouges de la quinta de Campanario.

Élégante demeure autrefois, cette quinta n’est plus qu’une misérable ruine. Plutôt que d’y chercher refuge pour le déjeuner,