Page:Verne - L'Agence Thompson and C°, Hetzel, 1907.djvu/220

Cette page a été validée par deux contributeurs.
204
L’AGENCE THOMPSON AND Co.

— Nous verrons s’il y a des juges à Londres !

— Parfaitement ! dit de nouveau le baronnet énergiquement.

— Et, pour commencer, je descends à terre, moi ! Je vais dans un hôtel, moi ! Un hôtel de premier ordre, monsieur ! Et je m’y installe à vos frais ! »

Saunders s’engouffra sur ces mots dans l’escalier des cabines. Bientôt, on le vit reparaître, portant sa valise, héler une embarcation, et quitter le bord avec une majestueuse mais bruyante dignité.

Pour ne pas se livrer à des protestations aussi véhémentes, la plupart de ses compagnons ne l’en approuvaient pas moins. Pas un qui ne jugeât sévèrement la légèreté de l’Agence Thompson, et beaucoup d’entre eux, à coup sûr, ne se borneraient pas à parcourir la capitale de Madère.

Alice et Dolly, à tout le moins, sillonneraient un peu l’île elle-même, elles l’avaient déjà résolu, et de ce voyage Roger naturellement ferait partie. Ce fut lui qui se chargea d’obtenir de Robert les renseignements préalables indispensables. Il se décida à élucider par la même occasion un doute qui le tracassait depuis trop longtemps touchant l’interprète du Seamew.

« Un renseignement, s’il vous plaît, mon cher monsieur, lui dit-il en l’abordant, non sans esquisser un malicieux sourire, après le repas du soir.

— Tout à vous, monsieur, répondit Robert.

— La famille Lindsay et moi, reprit Roger, désirons faire une excursion dans l’intérieur de Madère. Voudriez-vous avoir l’obligeance de nous indiquer le meilleur itinéraire à suivre ?

— Moi ! s’écria Robert, qu’à la lueur des fanaux Roger vit positivement rougir. Mais j’en suis incapable ! Je ne sais absolument rien sur cette île de Madère !

Pour la seconde fois, Robert s’apercevait qu’il avait complètement négligé son devoir. Cela le désolait et l’humiliait. Quelle faible volonté avait-il donc ? Quelles pensées le distrayaient ainsi de ce qui pour lui aurait dû être l’essentiel ?