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L’AGENCE THOMPSON AND Co.

— L’Agence Thompson, décida le sous-directeur d’un ton tranchant, est dirigée par un farceur qui fait des sottises, ou par un sot qui fait des farces. On a le choix.

Robert se mit à rire.

— Cependant, objecta-t-il, vos voyageurs ?

— La poste leur a déjà restitué leurs arrhes, doublées à titre de juste indemnité, et c’est précisément pour nous entendre au sujet de la vôtre que je vous ai prié de passer ce matin.

Mais Robert ne voulait pas d’indemnité. Être payé pour un travail accompli, rien de plus naturel. Quant à spéculer en quelque sorte sur les difficultés rencontrées par la Société qui l’avait accueilli, cela ne lui convenait pas.

— Très bien ! approuva son interlocuteur sans insister le moins du monde. Au reste, je puis en échange vous donner un bon conseil.

— Et ce conseil ?

— C’est tout simplement de vous présenter à l’Agence Thompson and Co, pour y remplir le rôle auquel vous étiez destiné ici. Et je vous autorise à vous présenter de notre part !

— Trop tard, repartit Robert. La place est prise.

— Bah ! Déjà ? Comment le savez-vous ?

— Par les affiches. L’Agence Thompson annonce même un interprète avec lequel je ne saurais certainement rivaliser.

— Alors, c’est par les affiches seulement ?…

— Seulement.

— Dans ce cas, conclut le sous-directeur en se levant, essayez toujours, croyez-moi. »

Robert se retrouva dans la rue, fort désappointé. Cette place, à peine tenue, lui échappait. Il retombait sur le pavé comme auparavant. Quant à suivre le conseil de l’Agence Baker, à quoi bon ? Quelle probabilité que la place fût libre ? D’autre part, cependant, ne devait-il pas tenter la chance jusqu’au bout ?

Dans cette irrésolution, il se laissait conduire par le hasard. Mais le ciel l’avait décidément pris sous sa protection spéciale,