Page:Verne - L'Agence Thompson and C°, Hetzel, 1907.djvu/206

Cette page a été validée par deux contributeurs.
190
L’AGENCE THOMPSON AND Co.

— Il faudrait lui demander cela à elle-même, mon cher.

Jack perçut le changement qui durcissait la voix de sa belle-sœur. Un éclair de colère passa dans ses yeux.

Cependant, par un violent effort, il réussit à se vaincre.

— C’est ce que je fais en ce moment, Alice, répondit-il, et j’attends avec angoisse son arrêt… Alice, reprit Jack, après avoir vainement attendu une réponse, ne voudriez-vous pas garder le même nom, en acceptant un nouveau mari ?

Froissant son mouchoir entre ses doigts crispés, les yeux pleins de larmes nerveuses, Alice se retourna vivement vers son beau-frère.

— Voilà une passion bien subite et une demande bien imprévue ! dit-elle d’un ton d’amère raillerie.

— Passion subite ! s’écria Jack. Pouvez-vous dire cela, Alice ? Serait-il vrai que vous n’ayez jamais remarqué combien je vous aime ?

— Ne prononcez plus ce mot ! interrompit Alice avec violence. Non, je ne me suis jamais aperçue de rien de ce que vous dites. Ah ! Dieu, si j’avais remarqué quelque chose, aurais-je été si insensée de vous laisser nous accompagner dans ce voyage ?

— Vous êtes dure pour moi, Alice, dit Jack. En quoi ai-je pu mériter une pareille colère ? ma démarche est à tel point une surprise pour vous, imposez-moi une attente, mettez-moi à l’épreuve, mais ne m’enlevez pas tout espoir.

Mrs. Lindsay regarda son beau-frère bien en face.

— Tout espoir au contraire, dit-elle fermement.

Jack laissa tomber son front dans ses mains avec toutes les apparences d’une profonde douleur. Alice en fut émue.

— Voyons, Jack, reprit-elle plus doucement, il y a là-dedans quelque malentendu. Peut-être vous trompez-vous involontairement. Peut-être, acheva-t-elle en hésitant, nos situations respectives sont-elles en partie la cause de cette erreur.

— Que voulez-vous dire ? demanda Jack en relevant la tête.

— J’ai été si peu de temps la femme de votre frère, poursuivit