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OÙ IL EST PROUVÉ QUE JOHNSON EST UN SAGE.

et des maisons ; vers l’Est, un océan de sommets, et la campagne, tantôt verdoyante, tantôt sillonnée de noirs et sauvages ravins ; au delà enfin des rivages de Saint-Michel, on distinguait, taches du miroir immense de la mer, les contours vagues de Tercère au Nord-Ouest et de Sainte-Marie au Sud-Est.

L’heure ne permettant pas une halte trop longue, on se dirigea rapidement vers le village. À mesure qu’on s’en approchait, le charme s’évanouissait peu à peu. Il disparut quand on parvint aux maisons. Ni plus ni moins sale, boueux et misérable que les autres, ce village ennobli de loin dans la gloire décevante du soleil.

« Les Sept Cités », avait dit Robert.

Et vraiment ce nom pompeux allait bien à cette agglomération de lamentables masures.

« Pourvu qu’on y trouve à déjeuner ! » grinça Roger entre ses dents.

Les ressources limitées du village suffirent pourtant à la troupe réduite des touristes. Une heure et demie plus tard, restaurés tant bien que mal, ceux-ci purent s’engager sur la route du retour. De visiter les volcans, les ravins, les précipices nombreux dans la vallée du cratère, il ne fut pas question, non plus que d’aller admirer les cascades pittoresques qu’il contient. Le temps manquait.

« C’est très anglais, cette façon de voyager, fit gaiement observer Roger à son compatriote. Voir quelque chose ? Pourquoi faire, du moment qu’on avale sa ration de kilomètres ? »

Onze milles environ séparent le village des Sept Cités de Ponta-Delgada. Partis vers trois heures de l’après-midi, les voyageurs devaient franchir aisément cette distance avant le coucher du soleil.

Entrés dans la vallée par le Nord, ils en remontaient maintenant les pentes méridionales, non sans jeter de temps à autre un regard de regret vers le village, dont la grâce renaissait à mesure qu’augmentait l’éloignement.