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L’AGENCE THOMPSON AND Co.

— Je ne me trompe pas ! s’écria-t-il. Don Hygino à bord du Seamew !

— Comme vous voyez, répondit celui-ci.

— Vous nous quittez donc ?

— Oh ! avec espoir de retour !

Un colloque animé s’engagea entre les deux Portugais. Don Hygino en traduisit bientôt l’essentiel à ses compagnons.

Au cours de la bagarre de l’après-midi, des malfaiteurs encore inconnus avaient profité du désordre causé par leur agression pour s’emparer du fameux crucifix. Dans une ruelle écartée, on avait seulement retrouvé le bois de la monture, veuve de ses pierreries, d’une valeur totale de six millions de francs. Le gouverneur avait en conséquence mis embargo sur tous les navires, jusqu’au moment où la bande des voleurs sacrilèges serait sous les verrous.

— Et cela peut durer ? interrogea Thompson.

L’inspecteur fit un geste vague, auquel Thompson répondit par une moue de désappointement. Cent quatre personnes à nourrir au total, cela rend onéreux les jours de retard !

À son instigation, Robert insista vainement. L’ordre du gouverneur était là, formel et décisif.

Mais, si furieux que fût Thompson, Saunders l’était plus encore. Un nouvel accroc au programme ! cela le jetait hors de lui.

— De quel droit nous retiendrait-on ici ? prononça-t-il énergiquement. Sous le pavillon qui nous couvre, nous n’avons pas d’ordre à recevoir des Portugais, je suppose !

— Parfaitement, approuva le baronnet. Et après tout, quel besoin avons-nous d’obéir à ce policeman ? Il n’a pas la prétention, je pense, d’arrêter à lui seul un navire portant soixante-six passagers, plus l’état-major et l’équipage !

Thompson du doigt montra les forts dont les masses sombres se profilaient dans la nuit, et cette réponse muette parut sans doute éloquente au baronnet, car il ne trouva rien à répliquer.

Fort heureusement, un secours inattendu allait lui arriver.