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l’île à hélice.

pouvoir y remédier, tantôt une humidité trop persistante, tantôt une sécheresse trop prolongée ?…

— Je vous arrête là, monsieur Munbar, déclare Frascolin. Que vous puissiez produire de la pluie à volonté, soit ! Mais quant à l’empêcher de tomber du ciel…

— Le ciel ?… Qu’a-t-il à faire en tout ceci ?…

— Le ciel, ou, si vous préférez, les nuages qui crèvent, les courants atmosphériques avec leur cortège de cyclones, de tornades, de bourrasques, de rafales, d’ouragans… Ainsi, pendant la mauvaise saison, par exemple…

— La mauvaise saison ?… répète Calistus Munbar.

— Oui… l’hiver…

— L’hiver ?… Qu’est-ce que c’est que cela ?…

— On vous dit l’hiver, les gelées, les neiges, les glaces ! s’exclame Sébastien Zorn, que les ironiques réponses du Yankee mettent en rage.

— Connaissons pas ! » répond tranquillement Calistus Munbar.

Les quatre Parisiens se regardent. Sont-ils en présence d’un fou ou d’un mystificateur ? Dans le premier cas, il faut l’enfermer ; dans le second, il faut le rosser d’importance.

Cependant les cars du tram filent à petite vitesse au milieu de ces jardins enchantés. À Sébastien Zorn et à ses camarades il semble bien qu’au delà des limites de cet immense parc, des pièces de terre, méthodiquement cultivées, étalent leurs colorations diverses, pareilles à ces échantillons d’étoffes exposés autrefois à la porte des tailleurs. Ce sont, sans doute, des champs de légumes, pommes de terre, choux, carottes, navets, poireaux, enfin tout ce qu’exigé la composition d’un parfait pot-au-feu.

Toutefois, il leur tarde d’être en pleine campagne, où ils pourront reconnaître ce que cette singulière région produit en blé, avoine, maïs, orge, seigle, sarrazin, pamelle et autres céréales.

Mais voici qu’une usine apparaît, ses cheminées de tôle dominant des toits bas, à verrières dépolies. Ces cheminées, maintenues par