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l’île à hélice.

Tampoo qu’en force et bien armé, cette fois. Dût-on fouiller toutes les paillotes, on ne quittera pas le village, on ne ralliera pas Standard-Island sans avoir retrouvé Pinchinat.

Le chemin de Tampoo est repris. Même solitude au village et aux alentours. Où donc s’est réfugiée toute cette population ? Pas un bruit ne se fait entendre dans les rues, et les paillotes sont vides.

Il n’y a plus malheureusement de doute à conserver… Pinchinat s’est aventuré dans le bois de bananiers… il a été saisi… il a été entraîné… où ?… Quant au sort que lui réservent ces cannibales dont il se moquait, il n’est que trop aisé de l’imaginer !… Des recherches aux environs de Tampoo ne produiraient aucun résultat… Comment relever une piste au milieu de cette région forestière, à travers cette brousse que les Fidgiens sont seuls à connaître ?… D’ailleurs, n’y a-t-il pas lieu de craindre qu’ils ne veuillent s’emparer de l’embarcation gardée par un seul matelot ?… Si ce malheur arrive, tout espoir de délivrer Pinchinat serait perdu, le salut de ses compagnons serait compromis…

Le désespoir de Frascolin, d’Yvernès, de Sébastien Zorn, ne saurait s’exprimer. Que faire ?… Le pilote et le mécanicien ne savent plus à quel parti s’arrêter.

Frascolin, qui a conservé son sang-froid, dit alors :

« Retournons à Standard-Island…

— Sans notre camarade ?… s’écrie Yvernès.

— Y penses-tu ?… ajoute Sébastien Zorn.

— Je ne vois pas d’autre parti à prendre, répond Frascolin. Il faut que le gouverneur de Standard-Island soit prévenu… que les autorités de Viti-Levou soient averties et mises en demeure d’agir…

— Oui… partons, conseille le pilote, et pour profiter de la marée descendante, nous n’avons pas une minute à perdre !

— C’est l’unique moyen de sauver Pinchinat, s’écrie Frascolin, s’il n’est pas trop tard ! »

L’unique moyen, en effet.

On quitte Tampoo, pris de cette appréhension de ne pas retrouver