Page:Verne - L'Île à hélice, Hetzel, 1895.djvu/372

Cette page a été validée par deux contributeurs.
339
un casus belli.

« Il sera sans doute retourné à l’embarcation par le sentier du village… dit Frascolin.

— Il a eu tort, répond le pilote. Mais ne perdons pas de temps, et rejoignons-le. »

On part, non sans une assez vive anxiété. Ce Pinchinat n’en fait jamais d’autre, et, de regarder comme imaginaires les férocités de ces indigènes, demeurés si obstinément sauvages, cela peut l’exposer à des dangers très réels.

En traversant Tampoo, le pilote remarque, avec une certaine appréhension, qu’aucun Fidgien ne se montre plus. Toutes les portes des paillotes sont fermées. Il n’y a plus aucun rassemblement devant la case du chef. Les femmes, qui s’occupaient de la préparation du curcuma, ont disparu. Il semble que le village ait été abandonné depuis une heure.

La petite troupe presse alors le pas. À plusieurs reprises, on appelle l’absent, et l’absent ne répond point. N’a-t-il donc pas regagné la rive du côté où l’embarcation est amarrée ?… Ou bien est-ce que l’embarcation ne serait plus à cet endroit, sous la garde du mécanicien et des deux matelots ?…

Il reste encore quelques centaines de pas à parcourir. On se hâte, et, dès que la lisière des arbres est dépassée, on aperçoit la chaloupe et les trois hommes à leur poste.

« Notre camarade ?… crie Frascolin.

— N’est-il plus avec vous ?… répond le mécanicien.

— Non… depuis une demi-heure…

— Ne vous a-t-il point rejoint ?… demande Yvernès.

— Non. »

Qu’est donc devenu cet imprudent ? Le pilote ne cache pas son extrême inquiétude.

« Il faut retourner au village, dit Sébastien Zorn. Nous ne pouvons abandonner Pinchinat… »

La chaloupe est laissée à la garde de l’un des matelots, bien qu’il soit peut-être dangereux d’agir ainsi. Mais mieux vaut ne revenir à