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battues.

n’est pas douteux que plusieurs carnassiers aient été atteints. Les autres, — une vingtaine — s’élancent, et, passant près du quatuor, sont salués d’une fusillade qui en frappe deux mortellement. À cet instant, un énorme tigre fonce sur le groupe, et Frascolin est heurté d’un si terrible bond qu’il va rouler à dix pas.

Ses camarades se précipitent à son secours. On le relève presque sans connaissance. Mais il revient assez promptement à lui. Il n’a reçu qu’un choc… Ah ! quel choc !

Entre temps, on cherche à pourchasser les caïmans sous les eaux de Serpentine-river, et comment sera-t-on jamais certain d’être débarrassé de ces voraces animaux. Heureusement, l’adjoint Hubley Harcourt a l’idée de faire lever les vannes de la rivière, et il est possible d’attaquer les sauriens dans de meilleures conditions, non sans succès.

La seule victime à regretter est un magnifique chien, appartenant à Nat Coverley. Saisi par un alligator, le pauvre animal est coupé en deux d’un coup de mâchoire. Mais une douzaine de ces sauriens ont succombé sous les balles des miliciens, et il est possible que Standard-Island soit définitivement délivrée de ces redoutables amphibies.

Du reste, la journée a été bonne. Six lions, huit tigres, cinq jaguars, neuf panthères, mâles et femelles, comptent parmi les bêtes abattues.

Le soir venu, le quatuor, y compris Frascolin remis de sa secousse, est venu s’attabler dans la restauration du casino.

« J’aime à croire que nous sommes au bout de nos peines, dit Yvernès.

— À moins que ce steamer, seconde arche de Noé, répond Pinchinat, n’ait renfermé tous les animaux de la création… »

Ce n’était pas probable, et Athanase Dorémus s’est senti assez rassuré pour réintégrer son domicile de la Vingt-cinquième Avenue. Là, dans sa maison barricadée, il retrouve sa vieille servante, au désespoir de penser que, de son vieux maître, il ne devait plus rester que des débris informes !