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l’île à hélice.

tomber des pluies de soie, à Fernambouc en 1820, des pluies jaunes, à Orléans en 1829, et dans les Basses-Pyrénées en 1836, des pluies de pollen arraché aux sapins en fleurs ?

Quelle origine attribuer à cette chute de poussières, mêlées de scories, dont l’espace semble chargé, et qui projette sur Standard-Island et sur la mer environnante ces grosses masses rougeâtres ?

Le roi de Malécarlie émet l’opinion que ces matières doivent provenir de quelque volcan des îles de l’ouest. Ses collègues de l’observatoire se rangent à son opinion. On ramasse plusieurs poignées de ces scories dont la température est supérieure à celle de l’air ambiant, et que n’a pas refroidies leur passage à travers l’atmosphère. Une éruption de grande violence expliquerait les détonations irrégulières qui se font encore entendre. Or, ces parages sont semés de cratères, les uns en activité, les autres éteints, mais susceptibles de se rallumer sous une action infra-tellurique, sans parler de ceux qu’une poussée géologique relève parfois du fond de l’Océan, et dont la puissance de projection est souvent extraordinaire.

Et, précisément, au milieu de cet archipel des Tonga que rallie Standard-Island, est-ce que, quelques années auparavant, le piton Tufua n’a pas couvert une superficie de cent kilomètres de ses matières éruptives ? Est-ce que, durant de longues heures, les détonations du volcan ne se propagèrent pas jusqu’à deux cents kilomètres de distance ?

Et, au mois d’août de 1883, les éruptions du Krakatoa ne désolèrent-elles pas la partie des îles de Java et de Sumatra, voisines du détroit de la Sonde, détruisant des villages entiers, faisant de nombreuses victimes, provoquant des tremblements de terre, souillant le sol d’une boue compacte, soulevant les eaux en remous formidables, infectant l’atmosphère de vapeurs sulfureuses, mettant les navires en perdition ?…

C’est à se demander, vraiment, si l’île à hélice n’est pas menacée d’un danger de ce genre…

Le commodore Simcoë ne laisse pas d’être assez inquiet, car