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l’île à hélice.

— Eh ! les ménétriers, j’ai une idée ! dit Pinchinat.

— Une idée de Son Altesse, réplique le violoncelliste, ce doit être une idée baroque !

— Baroque ou non, mon vieux Sébastien, répond Pinchinat, je suis sûr que tu l’approuveras.

— Voyons l’idée de Pinchinat, dit Frascolin.

— Ce serait d’aller donner un concert à Leurs Majestés, à elles seules, dans leur salon, et d’y jouer les plus beaux morceaux de notre répertoire.

— Eh ! fait Sébastien Zorn, sais-tu qu’elle n’est pas mauvaise, ton idée !

— Parbleu ! j’en ai, de ce genre-là, plein la tête, et quand je la secoue…

— Ça sonne comme un grelot ! répond Yvernès.

— Mon brave Pinchinat, dit Frascolin, contentons-nous pour aujourd’hui de ta proposition. Je suis certain que nous ferons grand plaisir à ce bon roi et à cette bonne reine.

— Demain, nous écrirons pour demander une audience, dit Sébastien Zorn.

— Mieux que cela ! répond Pinchinat. Ce soir même, présentons-nous à l’habitation royale avec nos instruments comme une troupe de musiciens qui viennent donner une aubade…

— Tu veux dire une sérénade, réplique Yvernès, puisque ce sera à la nuit…

— Soit, premier violon sévère mais juste ! Ne chicanons pas sur les mots !… Est-ce décidé ?…

— C’est décidé. »

Ils ont vraiment une excellente pensée. Nul doute que le roi dilettante soit très sensible à cette délicate attention des artistes français et très heureux de les entendre.

Donc, à la tombée du jour, le Quatuor Concertant, chargé de trois étuis à violon et d’une boîte à violoncelle, quitte le casino, et se dirige vers la Trente-neuvième Avenue, située à l’extrémité de la section tribordaise.