Page:Verne - L'Île à hélice, Hetzel, 1895.djvu/232

Cette page a été validée par deux contributeurs.
207
de fêtes en fêtes.

Il échange un salut avec les touristes français, et leur demande s’ils comptent regagner Papeeté le soir même.

« Non, monsieur Tankerdon, répond Frascolin. Nous avons reçu une invitation de mistress Coverley, et il est probable que nous passerons la soirée à la villa.

— Alors, messieurs, je vous dis au revoir, » réplique Walter Tankerdon.

Et il semble que la physionomie du jeune homme s’est obscurcie, bien qu’aucun nuage n’ait voilé en cet instant le soleil.

Puis, il pique des deux, et s’éloigne au petit trot, après avoir jeté un dernier regard sur la villa toute blanche entre les arbres. Mais aussi, pourquoi l’ancien négociant a-t-il reparu sous le richissime Tankerdon, et risque-t-il de semer la dissension dans cette Standard-Island qui n’a point été créée pour le souci des affaires !

« Eh ! dit Pinchinat, peut-être aurait-il voulu nous accompagner, ce charmant cavalier ?…

— Oui, ajoute Frascolin, et il est évident que notre ami Munbar pourrait bien avoir raison ! Il s’en va tout malheureux de n’avoir pu rencontrer miss Dy Coverley…

— Ce qui prouve que le milliard ne fait pas le bonheur ? » réplique ce grand philosophe d’Yvernès.

Pendant l’après-midi et la soirée, heures délicieuses passées au cottage avec les Coverley. Le quatuor retrouve dans la villa le même accueil qu’à l’hôtel de la Quinzième Avenue. Sympathique réunion, à laquelle l’art se mêle fort agréablement. On fait d’excellente musique, au piano s’entend. Mrs Coverley déchiffre quelques partitions nouvelles. Miss Dy chante en véritable artiste, et Yvernès, qui est doué d’une jolie voix, mêle son ténor au soprano de la jeune fille.

On ne sait trop pourquoi, — peut-être l’a-t-il fait à dessein, — Pinchinat glisse dans la conversation que ses camarades et lui ont aperçu Walter Tankerdon qui se promenait aux environs de la villa. Est-ce très adroit de sa part, et n’eût-il pas mieux valu se taire ?…