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l’île à hélice.

« Seulement, fait observer le commodore Simcoë, la nôtre a la faculté de se déplacer…

— Elle l’a trop, réplique Pinchinat, puisqu’elle ne s’arrête nulle part !

— Elle s’arrêtera aux îles Hao, Anaa, Fakarava, et vous aurez, messieurs, tout le loisir de les parcourir. »

Interrogé sur le mode de formation de ces îles, Ethel Simcoë se range à la théorie la plus généralement admise ; c’est que, dans cette partie du Pacifique, le fond sous-marin a dû graduellement s’abaisser d’une trentaine de mètres. Les zoophytes, les polypes, ont trouvé, sur les sommets immergés, une base assez solide pour établir leurs constructions de corail. Peu à peu, ces constructions se sont étagées, grâce au travail de ces infusoires, qui ne sauraient fonctionner à une profondeur plus considérable. Elles ont monté à la surface, elles ont formé cet archipel, dont les îles peuvent se classer en barrières, franges et attollons ou plutôt attol, — nom indien de celles qui sont pourvues de lagons intérieurs. Puis des débris, rejetés par les lames, ont formé un humus. Des graines ont été apportées par les vents ; la végétation est apparue sur ces anneaux coralligènes. La marge calcaire s’est revêtue d’herbes et de plantes, hérissée d’arbustes et d’arbres, sous l’influence d’un climat intertropical.

« Et qui sait ? dit Yvernès, dans un élan de prophétique enthousiasme, qui sait si le continent, qui fut englouti sous les eaux du Pacifique, ne reparaîtra pas un jour à sa surface, reconstruit par ces myriades d’animalcules microscopiques ? Et alors, sur ces parages actuellement sillonnés par les voiliers et les steamers, fileront à toute vapeur des trains express qui relieront l’ancien et le nouveau monde…

— Démanche… démanche, mon vieil Isaïe ! » réplique cet irrespectueux de Pinchinat.

Ainsi que l’avait dit le commodore Simcoë, Standard-Island vient s’arrêter le 23 septembre, devant l’île Hao qu’elle a pu approcher