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l’île à hélice.

santes de l’Europe. Mais, jusqu’alors un Français avait-il jamais paru à Standard-Island ?…

« Ce n’est pas probable, fait observer Pinchinat.

— Nous ne sommes pas assez riches… ajoute Frascolin.

— Pour être rentier, c’est possible, répond le surintendant, non pour être fonctionnaire…

— Y a-t-il donc un de nos compatriotes à Milliard-City ?… demande Yvernès.

— Il y en a un.

— Et quel est ce privilégié ?…

— M. Athanase Dorémus.

— Et qu’est-ce qu’il fait ici, cet Athanase Dorémus ? s’écrie Pinchinat.

— Il est professeur de danse, de grâces et de maintien, magnifiquement appointé par l’administration, sans parler des leçons particulières au cachet…

— Et qu’un Français est seul capable de donner !… » réplique Son Altesse.

À présent, le quatuor sait à quoi s’en tenir sur l’organisation de la vie administrative de Standard-Island. Il n’a plus qu’à s’abandonner au charme de cette navigation, qui l’entraîne vers l’ouest du Pacifique. Si ce n’est que le soleil se lève tantôt sur un point de l’île, tantôt sur un autre, selon l’orientation donnée par le commodore Simcoë, Sébastien Zorn et ses camarades pourraient croire qu’ils sont en terre ferme. À deux reprises, pendant la quinzaine qui suivit, des orages éclatèrent avec violentes bourrasques et terribles rafales, car il s’en forme bien quelques-unes sur le Pacifique, malgré son nom. La houle du large vint se briser contre la coque métallique, elle la couvrit de ses embruns comme l’accore d’un littoral. Mais Standard-Island ne frémit même pas sous les assauts de cette mer démontée. Les fureurs de l’Océan sont impuissantes contre elle. Le génie de l’homme a vaincu la nature.

Quinze jours après, le 11 juin, premier concert de musique de