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KÉRABAN-LE-TÊTU.

la tartane par l’avant ; puis elle l’entraînait dans son tourbillon, elle la jetait sur les récifs de gauche, vers la roche même, à l’endroit où elle émergeait près de la pointe nord-ouest. Là, le petit bâtiment se broya avec un fracas qui domina le bruit de la tourmente ; puis, il s’abîma en un clin d’œil, et le météore, rompu lui aussi, à ce choc de l’écueil, s’évanouit en éclatant comme une bombe gigantesque, rendant à la mer sa base liquide, et à la nue les vapeurs qui formaient son tournoyant panache.

On devait croire perdus tous ceux que portait la tartane, perdu le courageux sauveteur qui s’était précipité au secours des deux jeunes filles !

Kéraban voulu se lancer dans ces eaux furieuses, afin de lui venir en aide… Ses compagnons durent lutter avec lui pour l’empêcher de courir à une perte certaine.

Mais, pendant ce temps, on avait pu revoir Ahmet à la lueur des éclairs continus qui illuminaient l’espace. Avec une vigueur surhumaine, il venait de se hisser sur la roche. Il soulevait dans ses bras l’une des naufragées !… L’autre, accrochée à son vêtement, remontait avec lui !… Mais, sauf elles, personne n’avait reparu… Sans doute, tout