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KÉRABAN-LE-TÊTU.

— Hum ! fit Bruno, il n’y reste pas grand chose… et, quand il y en a à peine pour un, à coup sûr il n’y en a pas pour deux !

— En voyage, il faut savoir se contenter de ce que l’on trouve, monsieur Bruno !

— Ah ! tu fais le philosophe, se dit Bruno ! Ah ! tu te permets d’engraisser !… toi ! »

Et ramenant à lui l’assiette de Nizib :

« Eh ! que diable vous êtes-vous donc servi là ? dit-il.

— Je ne sais, mais cela ressemble beaucoup à un reste de mouton, répondit Nizib, qui replaça l’assiette devant lui.

— Du mouton ?… s’écria Bruno. Eh ! Nizib, prenez garde !… Je crois que vous faites erreur !

— Nous verrons bien, dit Nizib, en portant à sa bouche un morceau qu’il venait de piquer avec sa fourchette.

— Non !… non !… répliqua Bruno, en l’arrêtant de la main. Ne vous pressez pas ! Par Mahomet, comme vous dites, je crains bien que ce ne soit de la chair d’un certain animal immonde, — immonde pour un Turc, s’entend, et non pour un chrétien !

— Vous croyez, monsieur Bruno ?

— Permettez-moi de m’en assurer, Nizib. »