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KÉRABAN-LE-TÊTU.

— Oui ! il a des dispositions à devenir un beau et bon Turc, de majestueuse corpulence ! »

Van Mitten saisit le bras de Bruno qui allait éclater à ce compliment, si inopportunément envoyé, et Bruno se tut.

Cependant, l’araba se maintenait en bonne allure. Sans les cahots qui provoquaient de violentes secousses à l’intérieur, lesquelles se traduisaient par des contusions plus désagréables que douloureuses, il n’y aurait rien eu à dire.

La route n’était pas déserte. Quelques Lazes la parcouraient, descendant les rampes des Alpes Pontiques, pour les besoins de leur industrie ou de leur commerce. Si Van Mitten eût été moins préoccupé de son « interpellation », il aurait pu noter sur ses tablettes les différences de costume qui existent entre les Caucasiens et les Lazes. Une sorte de bonnet phrygien, dont les brides sont enroulées autour de la tête en manière de coiffure, remplace la calotte géorgienne. Sur la poitrine de ces montagnards, grands, bien faits, blancs de teint, élégants et souples, s’écartèlent les deux cartouchières disposées comme les tuyaux d’une flûte de Pan. Un fusil court de canon, un poignard à large lame, fiché dans une ceinture bordée