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KÉRABAN-LE-TÊTU.

Force serait de s’accommoder de l’un des véhicules du pays, et cet appareil de locomotion ne pourrait être que des plus rudimentaires.

Ainsi donc, soucieux et pensifs, allaient, sur le chemin du littoral, le seigneur Kéraban à pied, Bruno traînant par la bride son cheval et celui de son maître qui préférait marcher à côté de son ami ; Nizib, monté et tenant la tête de la petite caravane. Quant à Ahmet, il avait pris les devants, afin de préparer les logements à Choppa, et faire l’acquisition d’un véhicule, de manière à repartir au soleil levant.

La route se fit lentement et en silence. Le seigneur Kéraban couvait intérieurement sa colère, qui se manifestait par ces mots souvent répétés : « Cosaques, railway, wagon, Saffar ! » Lui, Van Mitten, guettait l’occasion de s’ouvrir à qui de droit de ses projets de séparation ; mais il n’osait, ne trouvant pas le moment favorable, dans l’état où était son ami qui se fût enlevé au moindre mot.

On arriva à Choppa à neuf heures du soir. Cette étape, faite à pied, exigeait le repos de toute une nuit. L’auberge était médiocre ; mais, la fatigue aidant, tous y dormirent leurs dix heures consécutives, tandis qu’Ahmet, le soir même, se mettait