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KÉRABAN-LE-TÊTU.

— Je n’ai pas faim !

— Vraiment, vous n’avez pas faim ! répliqua le seigneur Yanar. Au Kurdistan on a toujours faim… même après les repas !

— Ah ! au Kurdistan ?… répondit Van Mitten en avalant les morceaux doubles, — par obéissance.

— Et buvez ! ajouta la noble Saraboul.

— Mais, je bois… je bois vos paroles ! »

Et il n’osa pas ajouter :

« Seulement, je ne sais pas si c’est bon pour l’estomac !

— Buvez, puisqu’on vous le dit ! reprit le seigneur Yanar.

— Je n’ai pas soif !

— Au Kurdistan, on a toujours soif… même après les repas. »

Pendant ce temps, Ahmet, toujours en éveil, observait attentivement le guide.

Cet homme, assis à l’écart, prenait sa part du repas, mais il ne pouvait dissimuler quelques mouvements d’impatience. Du moins, Ahmet crut le remarquer. Et comment eût-il pu en être autrement ? À ses yeux, cet homme était un traître ! Il devait avoir hâte que tous ses compagnons et lui eussent cherché refuge dans la caverne, où le