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KÉRABAN-LE-TÊTU.

escabeaux devant la flamme pétillante du foyer, n’avaient plus aucun souci de la tourmente qui déchaînait au dehors ses dernières violences.

Avec quelle émotion tous apprirent ce qui s’était passé à la villa Sélim, peu d’heures après que le seigneur Kéraban les eut entraînés sur les routes de la Chersonèse ! Non ! Ce n’était point pour vendre à la jeune fille des étoffes précieuses que Yarhud avait jeté l’ancre dans la petite baie, au pied même de l’habitation du banquier Sélim, c’était pour opérer un odieux rapt, et tout donnait à penser que l’affaire avait été préparée de longue main.

Les deux jeunes filles enlevées, la tartane avait immédiatement pris la mer. Mais ce que ni l’une ni l’autre ne put dire, ce qu’elles ignoraient encore, c’est que Sélim eût entendu leurs cris, c’est que ce malheureux père fût arrivé au moment où la Guïdare doublait les dernières roches de la petite baie, c’est que Sélim eût été atteint d’un coup de feu, tiré du pont de la tartane, et qu’il fût tombé, — mort peut-être ! — sans avoir pu se mettre ni mettre aucun de ses gens à la poursuite des ravisseurs.

Quant à l’existence qui fut faite à bord aux deux jeunes filles, Amasia n’eut que peu de choses