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KÉRABAN-LE-TÊTU.

dont le dégagement se produisait à la surface d’un marais où ne manque pas l’hydrogène sulfuré.

Mais si, en sa qualité d’être raisonnant, sa raison risquait de l’induire en erreur, il ne pouvait en être ainsi des chevaux de la chaise, que leur instinct n’eût pas trompés sur la cause de ce phénomène. En effet, ils commencèrent à donner quelques signes d’agitation, les naseaux éventés, renâclant d’une façon insolite.

« Eh ! qu’est-ce cela ? se dit Bruno. Quelque nouvelle complication, sans doute ! Seraient-ce des loups ? ».

Que ce fût là une bande de loups, attirée par l’odeur de l’attelage, à cela rien d’impossible. Ces animaux, toujours affamés, sont nombreux dans le delta du Danube.

« Diable ! murmura Bruno, voilà qui serait encore plus malfaisant que les moustiques ou les cousins de notre entêté ! La fumée de tabac n’y ferait rien, cette fois ! »

Cependant, les chevaux ressentaient une vive inquiétude, à laquelle on ne pouvait se méprendre. Ils essayaient de ruer dans la boue épaisse, ils se cabraient, ils donnaient de violentes secousses à la voiture. Les points lumineux semblaient s’être