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GRANDS VOYAGES ET GRANDS VOYAGEURS

que dans la bijouterie et l’orfévrerie, dans la fabrication de ces riens coûteux pour lesquels l’Orient commençait à se passionner. En habile homme, Chardin prend un associé, aussi connaisseur que lui-même. Il ne fait d’abord que traverser rapidement la Perse pour gagner Ormuz et s’embarquer pour les Indes. L’année suivante, il est de retour à Ispahan et s’empresse d’apprendre la langue du pays, afin de traiter les affaires directement et sans intermédiaire. Il a le bonheur de plaire au shah Abbas II. Dès lors sa fortune est faite, car il est à la fois de bon ton et d’un courtisan avisé d’avoir le même fournisseur que son souverain. Mais Chardin eut un autre mérite que celui de faire fortune. Il sut recueillir sur le gouvernement de la Perse, les mœurs, les croyances, les usages, les villes, la population de ce pays, une masse considérable de renseignements qui ont fait de son récit, jusqu’à nos jours, le vade-mecum du voyageur. Ce guide est d’autant plus précieux que Chardin avait eu soin d’engager à Constantinople un habile dessinateur du nom de Grelot, par lequel furent reproduits les monuments, les cités, les scènes, les costumes, les cérémonies qui peignent si bien ce que Charron appelait « le tous les jours d’un peuple. »

Quand Chardin revint en France, en 1670, la révocation de l’édit de Nantes avait chassé de leur patrie, à la suite de persécutions barbares, une foule d’artisans, qui allèrent enrichir l’étranger de nos arts et de notre industrie. Chardin, protestant, comprit très-