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GRANDS VOYAGES ET GRANDS VOYAGEURS

qui en buvaient, Ponce de Léon résolut d’aller à sa recherche. Il faut croire qu’il sentait le besoin d’expérimenter cette eau, bien qu’il n’eût alors qu’une cinquantaine d’années.

Ponce de Léon équipa donc à ses frais trois vaisseaux, et partit du port Saint-Germain de Porto-Rico, le 1er mars 1512. Il se dirigea vers les Lucayes, qu’il visita consciencieusement ainsi que l’archipel des Bahama. S’il ne rencontra pas la fontaine de Jouvence qu’il cherchait si naïvement, il trouva du moins une terre qui lui parut fertile et à laquelle il donna le nom de Floride, soit parce qu’il y débarqua le jour de Pâques-Fleuries, soit à cause de son aspect enchanteur. Une telle découverte aurait satisfait un chercheur moins convaincu. Mais Ponce de Léon s’en alla d’île en île, dégustant toutes les sources qu’il rencontrait, sans s’apercevoir cependant que ses cheveux blancs redevinssent noirs ni que ses rides disparussent. Las enfin de ce métier de dupe, après six mois de courses infructueuses, il quitta la partie, laissant Perez de Ortubia et le pilote Antonio de Alaminos continuer la recherche, et rentra à Porto-Rico le 5 octobre. « Il y essuya beaucoup de railleries, dit le P. Charlevoix, de ce qu’on le voyait revenir très-souffrant et plus vieux qu’il n’était parti. »

On pourrait ranger cette expédition, ridicule dans ses motifs, mais fertile par ses résultats, au nombre des voyages imaginaires, si elle n’était garantie par des historiens aussi sérieux que Pierre Martyr, Oviedo, Herrera et Garcilasso de la Vega.