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GRANDS VOYAGES ET GRANDS VOYAGEURS

attirer les regards du monde entier et lui ramener la faveur de sa souveraine. Comment la découverte et la conquête de l’Eldorado, de ce pays où, suivant Orellana, les temples sont couverts de lames d’or, où tous les instruments, même les plus vils, sont en or, où l’on marche sur les pierres précieuses, ne procurerait-elle pas « plus de gloire — ce sont les termes mêmes que Raleigh emploie dans sa relation — que n’en acquirent Cortès au Mexique, Pizarre au Pérou ? Il aura sous lui plus de villes et de peuples et d’or que le roi des Espagnes, que le sultan des Turcs et que n’importe quel empereur ! » Nous avons parlé des fables qu’Orellana avait débitées en 1539 et qui avaient enfanté plus d’une légende. Humboldt nous dévoile ce qui leur avait donné naissance, en nous peignant la nature du sol et des rochers qui entourent le lac Parima, entre le rio Essequibo et le rio Branco. « Ce sont, dit ce grand voyageur, des roches d’ardoise micacée et de talc étincelant qui resplendissent au milieu d’une nappe d’eau miroitant sous les feux du soleil des tropiques. » Ainsi s’expliquent ces dômes d’or massif, ces obélisques d’argent et toutes ces merveilles que l’esprit enthousiaste et hâbleur des Espagnols leur fit entrevoir. Raleigh croyait-il à l’existence de cette ville d’or pour la conquête de laquelle il allait sacrifier tant d’existences ? Était-il lui-même bien persuadé, et ne céda-t-il pas aux illusions de son esprit avide de gloire ? On ne saurait le dire, mais ce qui est indiscutable, c’est que, pour employer les expressions