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GRANDS VOYAGES ET GRANDS VOYAGEURS

et, se mettant sous la garde de Dieu, les deux chaloupes prirent la mer. Elles gagnèrent les îles Orange et redescendirent la côte occidentale de la Nouvelle-Zemble au milieu de périls sans cesse renaissants.

« Le 20 juin, Nicolas Andrieu devint très-faible, et nous vîmes bien qu’il expirerait bientôt. Le lieutenant du gouverneur vint en notre chaloupe et nous dit que Nicolas Andrieu était fort mal disposé, et qu’il était bien apparent qu’il finirait bientôt ses jours. Sur quoi, Guillaume Barentz dit : « Il me semble aussi que ma vie ne durera guère. » Nous ne pensions pas que Barentz fût si malade, car nous causions ensemble, et Guillaume Barentz regardait la petite carte que j’avais faite de notre voyage. Nous eûmes ensemble divers propos. À la fin, il déposa la carte et me dit : « Gérard, donne-moi à boire. » Après qu’il eut bu, il lui survint une telle faiblesse qu’il tournait les yeux dans sa tête, et il mourut si subitement que nous n’eûmes pas le temps d’appeler le capitaine, qui était sur l’autre barque. Cette mort de Guillaume Barentz nous contrista grandement, vu qu’il était notre principal conducteur et notre seul pilote, en qui nous avions mis toute notre confiance. Mais nous ne pouvions résister à la volonté de Dieu, et cette pensée nous calma quelque peu. »

Ainsi mourut au milieu de ses découvertes, comme ses successeurs Franklin et Hall, l’illustre Barentz. Dans les termes si mesurés et si sobres de la courte oraison funèbre de Gerrit de Veer, on sent percer