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LES EXPÉDITIONS POLAIRES

boulevard de glace. Le temps était mauvais. Des brouillards excessivement intenses, épais comme de la purée de pois, diraient des matelots anglais, des îles de glace d’une demi-lieue de tour, des montagnes flottantes qui plongeaient de soixante-dix à quatre-vingts brasses dans la mer, tels furent les obstacles qui empêchèrent Frobisher d’atteindre, avant le 9 août, le détroit qu’il avait découvert pendant la campagne précédente. On prit possession du pays et l’on poursuivit sur terre et sur mer quelques pauvres Esquimaux, qui, blessés « en cette rencontre, sautèrent en désespérés du haut des rochers dans la mer, dit Forster dans ses Voyages dans le nord, ce qui ne serait pas arrivé s’ils s’étaient montrés plus soumis, ou si nous avions pu leur faire comprendre que nous n’étions pas leurs ennemis. » On découvrit bientôt une grande quantité de pierres semblables à celle qui avait été rapportée en Angleterre. C’était de la marcassite d’or, et l’on se hâta d’en recueillir deux cents tonnes. Dans leur joie, les marins anglais dressèrent une colonne commémorative sur un pic auquel ils donnèrent le nom de Warwick-Mount, et rendirent des actions de grâces solennelles. Frobisher s’éleva ensuite d’une trentaine de lieues dans le même détroit, jusqu’à une petite île qui reçut le nom de Smith’s Island. Les Anglais y trouvèrent deux femmes ; ils en prirent une avec son enfant et laissèrent l’autre à cause de son extrême laideur. Soupçonnant, tant la superstition et l’ignorance florissaient à cette époque, que cette femme avait