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GRANDS VOYAGES ET GRANDS VOYAGEURS

que si féconde en entreprises gigantesques, et qu’elle fournit les premiers renseignements sur l’immense zone de pays qui s’étend entre les Andes et l’Atlantique.

Mais revenons à Gonzalo Pizarre. Son embarras et sa consternation avaient été grands, lorsqu’en arrivant au confluent du Napo et du Marañon, il n’avait pas trouvé Orellana, qui devait l’y attendre. Craignant qu’un accident fût arrivé à son lieutenant, il avait descendu le cours du fleuve pendant cinquante lieues jusqu’à ce qu’il rencontrât un malheureux officier, abandonné pour avoir fait à son chef quelques représentations sur sa perfidie. À la nouvelle du lâche abandon et du dénûment dans lequel on les laissait, les plus braves furent découragés. Il fallut céder à leurs instances et revenir vers Quito, dont on était éloigné de plus de douze cents milles. Pour exprimer quelles furent leurs souffrances dans ce voyage de retour, il suffira de dire qu’après avoir mangé chevaux, chiens et reptiles, racines et bêtes sauvages, après avoir même mâché tout ce qui était cuir dans leur équipement, les malheureux survivants, déchirés par les broussailles, hâves et décharnés, regagnèrent Quito au nombre de quatre-vingts. Quatre mille Indiens et deux cent dix Espagnols avaient perdu la vie dans cette expédition, qui n’avait pas duré moins de deux ans.

Pendant que Gonzalo Pizarre conduisait la malheureuse expédition que nous venons de raconter, les anciens partisans d’Almagro, qui n’avaient jamais pu se rallier franchement à Pizarre, se groupaient autour du fils de leur ancien chef et complotaient la mort du Mar-