Page:Verne - Histoire des grands voyages et des grands voyageurs, Hetzel, 1870, tome 1.djvu/84

Cette page a été validée par deux contributeurs.

à la cour, pieds nus, suivant la règle franciscaine, ce qui leur valut d’avoir les orteils gelés. Introduits devant Mangu-Khan, ils virent « un homme au nez camard et de taille moyenne, couché sur un lit de repos et vêtu d’une fourrure brillante, tachetée comme la peau d’un veau marin. » Ce roi était entouré de faucons et autres oiseaux. Plusieurs sortes de liqueurs, un punch d’arrack, du lait de jument fermenté, du ball, sorte d’hydromel, furent offertes aux envoyés du roi de France. Ceux-ci s’abstinrent d’en boire ; mais le khan, moins sobre qu’eux, ne tarda pas à perdre la raison sous l’influence de ces boissons capiteuses, et l’audience dut être levée sans que la mission des ambassadeurs eût été remplie.

Rubruquis passa plusieurs jours à la cour de Mangu-Khan. Il y trouva un grand nombre de prisonniers allemands et français, principalement employés à la fabrication des armes et à l’exploitation des mines de Bocol. Ces prisonniers, bien traités par les Tartares, ne se plaignaient point de leur situation. Après plusieurs audiences que lui donna le grand khan, Rubruquis obtint la permission de partir, et il revint à Caracorum.

Près de cette ville s’élevait un magnifique palais appartenant au khan ; il ressemblait à un vaste église avec nef et double bas-côté. C’est là que le souverain siège sur une estrade élevée, à l’extrémité septentrionale ; les hommes s’assoient à sa droite et les femmes à sa gauche. C’est aussi dans ce palais que, deux fois l’an, on célèbre de splendides fêtes, quand tous les seigneurs du pays sont réunis autour de leur souverain.