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A cette époque, et bien qu’il n’eût point oublié ses griefs et sa mauvaise humeur, qui se traduisait souvent par de grosses paroles, Gadifer accepta le commandement d’une compagnie que le baron mit à sa disposition pour conquérir la Grande-Canarie.

Il partit le 25 juillet 1404, mais cette expédition n’amena aucun résultat utile. Tout d’abord les navigateurs furent très-éprouvés par la tempête et les vents contraires. Ils arrivèrent enfin près du port de Teldès, mais comme la nuit, tombait et que le vent soufflait en grande brise, ils n’osèrent débarquer en cet endroit, et ils se rendirent plus avant à la petite ville d’Argyneguy, devant laquelle ils restèrent mouillés pendant onze jours. Là, les naturels, excités par leur roi Artamy, dressèrent des embûches qui faillirent être fatales aux gens de Gadifer. Il y eut escarmouche, sang versé, et les Castillans, ne se sentant pas en nombre, vinrent passer deux jours à Teldès, et de là ils regagnèrent Lancerote.

Gadifer, très-contrarié de son insuccès, commença à trouver fort mauvais tout ce qui se passait autour de lui. Sa jalousie contre son chef grandissait chaque jour et il se laissait aller à de violentes récriminations, répétant que le baron de Béthencourt n’avait pas tout fait par lui-même, et que les choses ne seraient pas si avancées si d’autres n’y eussent mis la main. Ces paroles revinrent aux oreilles du baron, qui en fut très-courroucé. Il les reprocha à l’envieux Gadifer, ce qui amena entre eux un échange de gros mots. Gadifer persistait dans son idée de quitter ce pays où, plus il resterait, moins il