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HIER ET DEMAIN.

Le bruit sort de l’abîme impénétrable dans lequel la route s’est effondrée. Que se passe-t-il ?… On jugerait que des masses d’eau y tombent en cataractes, que des lames gigantesques s’y entrechoquent avec violence… Oui, c’est bien cela, car des volutes d’écume arrivent jusqu’à nous, et nous sommes couverts par les embruns.

Puis le calme renaît peu à peu… Tout rentre dans le silence… Le ciel pâlit… C’est le jour.

25 mai

Quel supplice que la lente révélation de notre situation véritable ! D’abord, nous ne distinguons que nos environs immédiats, mais le cercle grandit, grandit sans cesse, comme si notre espoir toujours déçu avait soulevé l’un après l’autre un nombre infini de voiles légers ; — et c’est enfin la pleine lumière, qui détruit nos dernières illusions.

Notre situation est des plus simples et peut se résumer en quelques mots : nous sommes sur une île. La mer nous entoure de toutes parts. Hier encore, nous aurions aperçu tout un océan de sommets, dont plusieurs dominaient celui sur lequel nous nous trouvons : ces sommets ont disparu, tandis que, pour des raisons qui resteront à jamais inconnues, le nôtre, plus humble cependant, s’est arrêté dans sa chute tranquille ; à leur place s’étale une nappe d’eau sans limite. De tous côtés, rien