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L’ÉTERNEL ADAM.

soient élevés à un égal degré de culture, mais dans l’ordre matériel !…

— Pourquoi pas ? objecta don Mendoza.

— Parce que, s’empressa d’expliquer Bathurst, le propre de nos inventions est qu’elles se répandent instantanément par toute la terre : la disparition d’un seul peuple, ou même d’un grand nombre de peuples, laisserait donc intacte la somme de progrès accomplis. Pour que l’effort humain fût perdu, il faudrait que toute l’humanité disparût à la fois. Est-ce là, je vous le demande, une hypothèse admissible ?…

Pendant que nous causions ainsi, les effets et les causes continuaient à s’engendrer réciproquement dans l’infini de l’univers, et, moins d’une minute après la question que venait de poser le docteur Bathurst, leur résultante totale n’allait que trop justifier le scepticisme de Mendoza. Mais nous n’en avions aucun soupçon, et nous discourions paisiblement, les uns renversés sur le dossier de leur siège, les autres accoudés sur la table, tous faisant converger des regards compatissants vers Mendoza que nous supposions accablé par la réplique de Bathurst.

— D’abord, répondit le président sans s’émouvoir, il est à croire que la terre avait jadis moins d’habitants qu’elle n’en a aujourd’hui, de telle sorte qu’un peuple pouvait fort bien posséder à lui seul le savoir universel. Ensuite, je ne vois rien d’absurde, a priori, à admettre que toute la surface du globe soit bouleversée en même temps.