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HIER ET DEMAIN.

et se dirigea vers la machine. Au moment où il allait donner le signal du départ, le gros homme revint sur lui, en s’écriant :

— Et mes colis, mille diables ?

— Comment ! vos colis !… riposta le capitaine. Seraient-ce eux, par hasard, qui arrivent ?

Des murmures éclatèrent parmi les voyageurs que ce nouveau retard impatientait.

— À qui en veut-on ? s’écria l’intrépide passager. Ne suis-je pas un libre citoyen des États-Unis d’Amérique ? Je m’appelle Augustus Hopkins, et si ce nom ne vous en dit pas assez… »

J’ignore si ce nom jouissait d’une influence réelle sur la masse des spectateurs. Quoi qu’il en soit, le capitaine du Kentucky fut forcé d’accoster pour embarquer les bagages d’Augustus Hopkins, libre citoyen des États-Unis d’Amérique.

« Il faut avouer, dis-je à Mrs. Melvil, que voilà un singulier homme.

— Moins singulier que ses colis, me répondit-elle, en me montrant deux camions qui amenaient à l’embarcadère deux énormes caisses de vingt pieds de haut, recouvertes de toiles cirées et ficelées au moyen d’un inextricable réseau de cordes et de nœuds. Le haut et le bas étaient indiqués en lettres rouges, et le mot « fragile », inscrit en caractères d’un pied, faisait trembler à cent pas à la ronde les représentants des administrations responsables.