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HIER ET DEMAIN.

par le gouvernement pour la capture d’un forçat évadé accroissent l’acuité des regards des paysans, la rapidité de leurs jambes, la vigueur de leurs bras. Or, tout fugitif risque fort d’être reconnu, soit qu’habitué au poids des fers, il traîne un peu la jambe, soit qu’un trouble délateur lui monte au visage.

Après trois heures de marche, les deux hommes s’arrêtèrent sur un signe de M. Bernardon. Celui-ci tira d’un bissac qu’il portait sur l’épaule quelques victuailles qui furent avidement dévorées à l’abri d’une haie touffue.

« Dormez maintenant, dit le Marseillais, quand ce court repas fut terminé. Vous avez à faire une longue route, et il faut ménager vos forces. »

Jean ne se fit pas répéter l’invitation, et, s’étendant sur le sol, il tomba, comme une masse, dans un sommeil de plomb.

Le jour était levé quand M. Bernardon le réveilla. Tous deux se remirent en marche aussitôt. Il ne s’agissait plus maintenant de filer à travers champs. Ne pas se cacher, en se montrant toutefois le moins possible, ne pas éviter les regards tout en ne se laissant pas examiner de près, suivre ostensiblement les grandes routes, telle devait être désormais la ligne de conduite à adopter.

M. Bernardon et Jean Morénas marchaient depuis longtemps déjà, lorsque ce