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LA DESTINÉE DE JEAN MORÉNAS.

sévère et plus méticuleuse la surveillance des autres. Le Commissaire du bagne se félicitait fort de ce résultat, sans se laisser endormir dans une trompeuse sécurité, car, à Toulon, les évasions étaient plus fréquentes et plus faciles qu’en tout autre port de répression.

Midi et demi sonnait à l’horloge de l’Arsenal, lorsque M. Bernardon atteignit l’extrémité de la Darse Neuve. Le quai était désert. Une demi-heure plus tôt, la cloche avait rappelé dans leurs prisons respectives les forçats au travail depuis l’aube. Chacun d’eux avait alors reçu sa ration. Les condamnés à perpétuité étaient remontés sur leur banc, et un garde les y avait aussitôt enchaînés, tandis que les condamnés à temps pouvaient librement circuler dans toute la longueur de la salle. Au coup de sifflet de l’adjudant, ils s’étaient accroupis autour des gamelles, contenant une soupe faite, toute l’année, de fèves sèches.

Les travaux seraient repris à une heure, pour n’être abandonnés qu’à huit heures du soir. On ramènerait alors les condamnés à leurs prisons, où, pendant quelques heures de sommeil, il leur serait enfin loisible d’oublier leur destin.


II


M. Bernardon profita de l’absence des forçats pour examiner la disposition du