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inspirée par une insurmontable horreur. Visiblement, il avait eu la pensée de se jeter sur cet homme… Mais, ayant détourné la tête, il parvint à se dominer.

« Vous voilà en route pour Laval, monsieur le notaire ? reprit Rip.

— Comme vous le voyez, monsieur Rip. Des affaires qui vont me retenir pendant quelques heures ! Bon ! j’espère bien être de retour ce soir à Montréal.

— Cela vous regarde.

— Et que faites-vous là avec vos hommes ? demanda maître Nick. Toujours à l’affût pour le compte du gouvernement ! En aurez-vous arrêté de ces malfaiteurs ! Bah ! on a beau en prendre, ils se multiplient comme les mauvaises herbes ! En vérité, ils feraient mieux de devenir d’honnêtes gens…

— Comme vous dites, monsieur Nick, mais c’est la vocation qui leur manque !

— La vocation ! Toujours plaisant, monsieur Rip !

— Est-ce que vous êtes sur la trace de quelque criminel ?

— Criminel pour les uns, héros pour les autres, répondit Rip. Cela dépend du point de vue !

— Qu’entendez-vous dire ?

— Que l’on a signalé dans l’île la présence de ce fameux Jean-Sans-Nom…

— Ah ! le fameux Jean-Sans-Nom ! Oui ! les patriotes en ont fait un héros, et non sans de bons motifs ! Mais, paraît-il, Sa Gracieuse Majesté n’est pas de cet avis, puisque le ministre Gilbert Argall vous a lancé à ses trousses !

— En effet, monsieur Nick !

— Et vous dites qu’on l’a vu dans l’île de Montréal, ce mystérieux agitateur ?…

— On le prétend du moins, répondit Rip, quoique je commence à en douter !

— Oh ! s’il y est venu, il doit en être reparti, répliqua maître Nick,