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Et il poursuivit en ces termes :

Serait-ce un effet de mirage,
Produit par le trouble de l’air
Sur l’horizon déjà moins clair,
Ou, vers la fin de quelque orage,
Le reste d’un dernier éclair ?

Est-ce la lueur d’un bolide,
D’un météore icarien,
Qui, dans son cours aérien,
Était lumineux et solide,
Et dont il ne reste plus rien ?

Ou sur les champs dont il éclaire
D’un pâle reflet le sillon,
Quelque mystérieux rayon
Tombé d’une aurore polaire,
Comme un nocturne papillon ?

« Qu’est-ce que vous pensez de tout ce fatras de troubadour, monsieur ? demanda maître Nick au voyageur.

— Je pense, monsieur, répondit celui-ci, que votre jeune clerc a quelque imagination, et je suis curieux de savoir à quoi il pourrait encore comparer son feu follet.

— Continue donc, Lionel ! »

Lionel avait quelque peu rougi au compliment du jeune homme, et, d’une voix plus vibrante, il dit :

Serait-ce en ces heures funèbres,
Où les vivants dorment lassés,
Le pavillon aux plis froissés
Qu’ici-bas l’Ange des ténèbres
Arbore au nom des trépassés ?

« Brrr !… » fit maître Nick.

Ou bien, au milieu des nuits sombres,
Lorsque le moment est venu,
Est-ce le signal convenu
Que la terre, du sein des ombres,
Envoie au ciel vers l’inconnu,